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célébrait ses mystères, en grande pompe, et tandis que les eunuques, seuls admis à la contempler, rendaient leurs devoirs à la Loi divine, les citoyens, dans toute la ville, en signe de communion, observaient, durant vingt-quatre heures, un jeûne de parole absolu.

C’est pourquoi, saisie de respect, la cohue disciplinait ses ardeurs. Et, quand ses premiers rangs aboutirent à la vaste place de Forvière, devant le parvis du Temple, on n’entendait plus qu’un dévot murmure s’exhaler des lèvres crispées. Quelques audacieux proclamèrent :

— Prêtres de la Loi, recevez le poète !

En robe rouge et les épaules couvertes d’hermine, des vieillards parurent sous l’inviolable portique. Ils aperçurent le peloton des policiers, toujours encadrant l’holocauste, et, plus loin, ces milliers de visages convulsés, de doigts tendus, de poings brandis qui précisaient, avec une éloquence immédiate, l’objet de cette surprenante irruption.

Les vieillards comprirent ce que le peuple attendait d’eux.

Ils firent signe d’avancer, et l’horrible procession, lentement, pieusement, précédé de son vivant trophée, inonda les degrés du sanctuaire. Les portes de bronze s’ouvrirent et des flots de lumière, avec le poète, entrèrent dans la basilique.

Les robes rouges des prêtres barrèrent le seuil à la multitude et nul ne tenta de franchir cet auguste rempart

Pourtant les yeux les plus favorisés purent suivre, entre les toges de pourpre, la cérémonie expiatoire.

Le poète, très ferme et d’un pas léger soutenu par d’invisibles puissances, s’avançait vers le transept. Les cristaux des verrières, les gemmes des mosaïques, les ors des candélabres s’allumaient sur son passage et lui faisaient une réception triomphale. Aux architraves, les