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« Il appartient au Quotidien, collaborateur désintéressé du Progrès, de tenter la première expérience de cette étonnante découverte, pour qu’en apparaisse à tous les yeux la fécondité inépuisable. La légende des siècles est finie : il s’agit d’en écrire l’histoire (et l’on voit tout de suite combien s’en trouvera simplifiée l’irritante question des manuels scolaires). Le Passé, non plus que l’Avenir, ne se décidant à venir à nous, le mieux est encore d’y aller voir. Et c’est pourquoi, voulant appliquer à cette œuvre de documentation les méthodes du journalisme moderne, nous avons pris l’initiative d’une vaste, d’une immense enquête : l’Enquête des Origines et des Destinées. Deux de nos collaborateurs ont été choisis pour mener à bien cette périlleuse mission : l’un, M. Paul Toussaint (c’est moi, sans nulle vanité), qui a déjà tiré au clair le problème de la pluralité des mondes habités en réalisant ce tour de force d’interviewer les Martiens, s’enfoncera dans les entrailles inexplorées du Futur, tandis que son confrère, M. Roger Rogeot, se réserve de remonter jusqu’à sa source le cours des Âges, afin de réveiller par une graduelle régression la mémoire assoupie de l’Humanité.

« Messieurs, ce sera l’impérissable honneur du Quotidien d’avoir, à ses risques et périls, ouvert la route à l’audace des chercheurs à venir. La date du 1er avril 1915 est de celles qui feront époque dans les annales de la Science. Messieurs, les braves gens qui vont partir, peut-être sans retour, pour le grand voyage du Temps, vous saluent. »

Je me tenais à califourchon sur mon appareil, la main sur le levier de mise en marche. Sur un signe, je poussai à fond la commande. Aussitôt la machine s’ébroua, bondit, perça les murs, comme une flèche une vapeur, — car elle avait la propriété de se mouvoir simultanément dans l’espace. Je perdis la notion de l’ambiance, je perçus seulement une alternance brusque de blanc et de noir : le