Page:Lyriques grecs - traduction Falconnet.djvu/529

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l’ont repoussée ; mais Astérie l’a d’elle-même invitée : Astérie, vil fardeau de la mer… Déesse, tu la connais… mais venge-nous, tu le peux ; venge tes ministres qui, pour t’obéir, étaient descendus sur la terre. »

Elle dit, et s’assit au bas du trône d’or de la déesse ; ainsi le chien de Diane, après une course rapide, se repose à ses pieds, les oreilles droites et toujours attentives à la voix de sa maîtresse : telle la fille de Thaumas est aux genoux de Junon ; jamais elle ne quitte cette place, pas même dans les instants où le dieu de l’oubli lui couvre les yeux de ses ailes ; mais sur les marches même du trône, la tête penchée, elle dort d’un somme léger, sans ôter sa ceinture ni ses brodequins, crainte d’un ordre subit de la reine. Junon indignée frémit et s’écrie : « Ainsi du moins, infâmes objets des amours de Jupiter, puissiez-vous cacher toujours vos plaisirs adultères et en déposer les fruits non dans l’asile ouvert aux dernières des esclaves, mais dans les antres déserts où les vaches marines enfantent leurs petits ! Toutefois, j’oublie l’injure que me fait Astérie ; elle ne ressentira point un courroux qu’elle a bien mérité par sa pitié pour Latone. Je lui dois trop, puisqu’elle n’a point souillé mon lit et qu’elle a préféré la mer à mon époux. »

Ainsi parla Junon. Cependant les chantres harmonieux de Phébus, les cygnes de Méonie, quittant le Pactole, vinrent tourner sept fois autour de Délos et chantèrent autant de fois l’accouchement de Latone. Ce fut en mémoire de ces chants sept fois répétés que, dans la suite, le dieu monta sa lyre de sept cordes. Ils chantaient encore pour la septième fois, et Phébus naquit. Les nymphes déliennes, les filles de l’antique Inopus, entonnèrent l’hymne sacré d’Ilithye ; la voûte céleste répéta leurs concerts éclatants, et Junon n’en fut point courroucée : Jupiter l’avait apaisée.

Délos, en cet instant, tout chez toi devint or ; ton lac en ce jour ne roula que de l’or, le palmier au pied duquel