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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/114

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RIENZI.

monuments d’une haute ambition, d’une grandeur souveraine, évoquent seulement des images de l’avenir. Rome peut encore, avec son diadème des sept collines, redevenir la Rome d’autrefois, le prix du bras le plus robuste et du guerrier le plus brave ; ravivée, non par ses fils dégénérés, mais par l’infusion du sang d’une race nouvelle. Guillaume le Bâtard n’a pas trouvé dans ces fameux Anglo-Saxons une conquête plus facile que Walter le Bien-né dans ces eunuques romains. Et des deux conquêtes quelle serait la plus glorieuse, l’île barbare ou la métropole du monde ? Du général au podestat il n’y a qu’un pas… il y a moins qu’un pas du podestat au roi ! »

Tandis qu’il caressait ainsi son ambition effrénée, mais non pas chimérique, un pas rapide et léger se fit entendre au travers des longues herbes ; levant les yeux, Walter de Montréal aperçut la figure d’une grande femme descendant de cette partie de la colline que couvraient alors de nombreux couvents, vers la base de l’Aventin. Elle appuyait ses pas sur un long bâton et marchait si droite et si dégagée que, maintenant, sa figure devenant visible à la lueur des étoiles, il fut surpris d’y trouver la tête d’une femme d’un âge avancé, visage dur, fier, flétri, profondément ridé, mais dont les traits n’étaient point sans une certaine régularité.

« Sainte Vierge ! s’écria Montréal, reculant soudain, lorsque ce visage rayonna devant lui. Est-il possible ! c’est elle, c’est… » Il s’élance et s’arrête debout devant la vieille qui paraît également surprise à son tour, mais plus effrayée, à la vue de Montréal.

« Voilà des années que je te cherche, dit le chevalier, rompant le premier le silence, voilà bien des années, de longues années ; ta conscience peut te dire pourquoi…

La mienne, homme de sang ! s’écria la femme, tremblante de colère ou de crainte ; oses-tu bien parler