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NOMS INDIENS DU PÉRIPLE DE LA MER ÉRYTHRÉE


d’éliminer les mots où st est conservé puisque ‘Acr-axazpx et SpaaxpYjVYi font difficulté des deux points de vue. Mais comment admettre que des noms communs comme ypaai et surtout comme TpaTiTraya, dont il n’existe pas d’original sanskrit connu, soient des tatsamas ?

Le seul moyen de concilier ces données contradictoires est de supposer que ces groupes de transcriptions remontent à des dialectes différents. Or, il est clair que llaiôava doit appartenir au dialecte du Dekhan, c’est-à-dire précisément de la région où se trouvent les textes épigraphiques dont la phonétique s’accorde avec celle de ce nom. D’autre part il est aisé de constater qu’il est question des serpents de mer, ypa^ct, à propos de l’entrée de rindus (§ 38) et que les autres noms examinés viennent de la région de Barugaza et du golfe de Cambaye (§ 43-44).


On est amené ainsi à admettre l’existence à l’époque du Périple d’un dialecte plus conservateur dans la région des bouches de l’Indus et de Kathiawar, s’opposant au dialecte de Dekhan, plus évolué. Aux vraisemblances générales qui rendent cette conclusion acceptable, s’ajoutent des témoignages indigènes. On sait que déjà parmi les inscriptions d’Açoka, celles de l’Ouest et du Nord-Ouest présentent un plus grand nombre d’archaïsmes que les autres ; il est remarquable qu’à Girnar et à Shahbazgarhi en particulier les groupes consonne + r sont fréquemment conservés, alors qu’ils sont réduits partout ailleurs ; à Girnar aussi se retrouvent les groupes, d’ailleurs énigmatiques, de st et st. D’autre part, parmi les prâkrits littéraires, c’est en mâhârâstrï que la chute des consonnes intervocaliques est le plus constante^^1.

Si cette conclusion est exacte, il est permis de mettre en rapport ce caractère conservateur de la langue du Kathiawar et de la région environnante avec la réaction sanskritisante de la

1. À en juger par les exemples donnés plus haut, la disparition des intervocaliques est même dans le Dekhan postérieure au ier siècle de J.-C.