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Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/259

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CLIGÈS 255

voit pas en quoi : De Tristan et d'Iseut la blonde allait tout aussi bien. On peut croire qu'il s'agit ici d'un petit poème épisodique, — comme le lai du Cbievrefoil de Marie ou celui qu'a utilisé l'auteur du Donei des aiiian^, — où était traité quelque incident de la légende dans lequel le roi Marc avait une part prépondé- rante ' .

Chrétien, nous l'avons vu, cite déjà Tristan dans Philoniena ^, et il est difficile de croire que son poème sur Marc et Iseut soit antérieur à cette traduction d'Ovide'. Dans Erec il fait trois allusions précises à l'histoire de Tristan et Iseut, comme il en fait aux romans à' Alexandre, à'Encas, de Troie, et aux chansons de geste de Roland, de Fernagu,d'Ospi}iel et de Guillaume d'Orange. Il est naturel de croire qu'il se réfère, aussi pour Tristan, à un poème étranger plutôt qu'à une œuvre de lui : on ne trouve dans aucun de ses poèmes d'allusions de ce genre à ses poèmes antérieurs '^. C'est surtout dans Cligès qu'il se montre préoccupé de l'histoire de Tristan (ou plutôt de celle d'Iseut); mais c'est pour opposer à la conception de l'amour adultère telle qu'elle y est représentée une conception diflerente et plus raffinée. Je reviendrai sur ce point ; mais je demande s'il est vraisemblable qu'un poète parle (fût-ce par la bouche d'un de ses person- nages) d'une de ses propres œuvres en des termes comme ceux- ci : Laniors d'Iseut et de Tristan, Dont tantes folies dit l'an One

��1 . On peut songer à reconnaître une allusion au poème de Chrétien dans ces vers du Tresaur de Peire de Corbiac : E ciel clerc hmsenger per ciial laii- seriganienti De Icis (Isolt) e ciel rei Marc partils niaridavient:^. Je ne vois rien de pareil dans les poèmes sur Tristan que nous connaissons. M. Birch-Hirs- chfeld (JJeher die den Troubadours hekaniiteii epischeii Stoffe, p. 42) voit là « la séparation du mariage de Marc et d'Iseut par les insinuations du nain >> ; mais le nain qui dénonce à Marc les amours de Tristan et d'Iseut ne « sépare » nullement le mariage du roi et de sa femme, et Peire parle d'un clerc et non d'un nain.

2. Il s'agit de l'excellence de Tristan dans les jeux d'adresse, telle que nous la trouvons signalée surtout dans la rédaction rattachée à Béroul.

5. C'est ce que j'avais conjecturé jadis; mais je ne serais pas de cet avis maintenant .

4. Sauf le renvoi à Lanceloi dans Yvaiii, qui a une raison d'être particu- lière.

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