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C LIGES 265

Gerbert de Montreuil nous apprend que ce fut la mort qui empêcha Chrétien de terminer son poème. On peut croire qu'elle le surprit (J'adevnnça) encore jeune : le Perceval ne révèle aucune sénilité ; au contraire, le poète n'a peut-être rien écrit de plus vivant et de plus gracieux que certains passages de ce poème, notamment la scène bien connue du début. Je suppose qu'il mourut en 1175.

Récapitulons les résultats, nécessairement en grande partie hypothétiques, de notre enquête. On peut attribuer à Chrétien de Troies une activité poétique d'environ quinze ans. Il aura débuté par Philonicna vers 11 60, écrit ensuite la traduction de YArs aiitatoria et celle des Remédia aiiioris, puis deux petits poèmes épisodiques, le Mors de Vespaiile (sujet inconnu) et Del roi Marc et d'Iseut; Erec, le premier de ses grands romans, se placera vers 1168, Cligès vers 1170 \ Lancelot en 1172, Yvain en 1173, Perceval en 11 74-1 175 ; il sera mort en 1 175, âgé, si on suppose qu'il a débuté à vingt-cinq ans environ-, d'une quarantaine d'années seulement.

htant données ces dates, qui paraissent probables, quelle est la place qu'occupe Chrétien dans la littérature de son temps ? Il nous apparaît, à ses débuts, comme soumis à l'influence des romans imités de l'antiquité, alors dans toute leur vogue. Dans Erec au moins il montre qu'il connaît (sans parler à' Alexandre) Thébes, Enéas et même Troie (ce dernier écrit, comme nous l'avons vu, vers 11 60); déjà dans Philomena il cite Apoloine, qui devait être une œuvre assez analogue. Ailleurs il cite de petits

��donna à Chrétien pour le rimoier. Cette conjecture, — à laquelle bien entendu, je n'attache pas d'importance, — tient, on le voit, à 1' « hypothèse anglo-normande » sur l'origine des romans arthuriens dont M. Fôrster ne veut pas entendre parler.

1. Si on veut lui attribuer GniUaimie ifAno-Jeteire, c'est entre Cligès et Lancelot que ce poème, dont l'auteur dit avoir trouvé la source en Angleterre, se placerait le plus naturellement ; mais il faut avouer qu'il tranche singu- lièrement, tant par le talent que par le ton et l'esprit, avec l'un et avec l'autre.

2. Ces résultats diffèrent quelque peu de ceux de M. Fôrster, qui place (quoique avec hésitation) C%(!5 vers 1155, le poème sur Tristan vers 1 1 5 2, les Ovidiana vers 1 1 50, le Perceval, sans préciser davantage, avant 1 19 1 .

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