Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/175

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peine elle était en activité, que Napoléon projeta de réduire le Sénat à une nullité telle qu’il ne fût que l’instrument de ses caprices. Par son intermédiaire, il démolit graduellement tout l’édifice social : aux nominations constitutionnelles dans le premier corps de l’état, il opposa un nombre à peu près égal de membres, parmi lesquels cependant il en est quelques uns dont la conduite honorable a trompé ses intentions perverses ; par là s’explique la conduite du Sénat, dont une grande majorité perfide et lâche a constamment opprimé une minorité peu nombreuse. Cette minorité, étrangère aux faveurs du maître, et bravant ses fureurs, a conservé le courage civil et la probité politique, deux choses si rares en France et si nécessaires aux hommes revêtus d’éminentes dignités.

« Dans tous les corps constitués, Tribunat, Corps législatif, administrations, tribunaux, il trouva des ames vénales qui consentirent à devenir ses complices ; à l’usurpation du sceptre il avait préludé par l’assassinat d’un rejeton de l’ancienne dynastie, et par l’ostracisme d’un général dont la gloire était alors pure et sans nuage.

« L’élévation de Napoléon au trône impérial, proposée par l’adulation, proclamée par la bassesse, fut écoutée avec froideur au milieu de la consternation générale ; le temps dévoilera les trames ourdies pour grossir la prétendue majorité des votes : il dira qu’aux signatures offertes par la flatterie, ou arrachées par la terreur, on