vous est nécessaire, disait un des plus beaux génies du christianisme, et votre réputation est nécessaire au prochain ; il est coupable de cruauté celui qui, se reposant sur son cœur, néglige sa réputation[1]. » Tel est le motif qui a porté tant d’hommes qui valaient beaucoup mieux que moi, les uns, comme saint Grégoire de Naziance, à écrire leur vie[2] ; les autres, comme Pierre de Blois, à faire leur apologie[3]. Avant eux Salluste, Suétone, Tacite, et après eux cent autres, ont mêlé à leurs ouvrages le récit d’événemens qui leur étaient personnels. La fausse gloire et la fausse modestie sont, dit le cardinal de Retz, les deux écueils que n’ont pu éviter la plupart de ceux qui ont écrit leur propre vie : il en excepte César et de Thou[4] ; de Thou à la bonne heure, mais César, ce brigand fameux qui fait périr à Bourges quarante mille individus, et qui a l’impudence de vanter son humanité !
Mademoiselle de Staal prétend qu’on est trop près de soi pour se bien juger ; ainsi, lecteur, soyez en garde ; car en promenant vos regards sur des faits contemporains, je vous parlerai de moi. Si vous redoutez l’ennui, qui