Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/351

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Les Parisiens, en général, ne voyent que leur cité ; on dirait qu’à peine se doutent-ils que la France ait d’autres villes, ou du moins qu’à leurs yeux ce sont des points imperceptibles : ils ont l’ineptie de prétendre, et la généralité des Français a l’ineptie de croire, qu’à Paris seul on trouve de grands talens. Une conséquence de ce préjugé est de vouloir accaparer tous les monumens, et comme cet esprit domine dans les académies et comités littéraires de la capitale, composés de membres, la plupart habitans de Paris, des relations habituelles avec le ministère leur facilitent les moyens d’extraire de tous les dépôts qui sont en France, ce qui tente leur convoitise.

J’avais sans relâche combattu cette manie, aussi injuste qu’impolitique, de dépouiller tous les départemens. Les productions du génie et les moyens d’instruction sont la propriété commune ; ils doivent être répartis sur la surface de la France comme les réverbères dans une cité ; mais on veut tout accumuler ici. Arras possédait une Bible des premières éditions de Mayence ; j’avais empêché qu’Arras ne fût volé ; pendant mon absence, le comité décida en faveur du vol. J’avais demandé à certaine époque qu’on recherchât à Metz un manuscrit inédit de Drouin, abbé de Saint-Pierremont, sur l’histoire du Pays au dix-septième siècle ; à l’instant on le fait venir pour l’envoyer à l’Arsenal, où personne ne le consulte.