Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/380

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donc étrangers à la conscience ? Le grand vice de l’éducation moderne, surtout en France, est de donner presque tout à l’esprit, rien au cœur. De là beaucoup de talens et très peu de vertus ; et ces talens, qui devraient n’être que les instrumens de la vertu, deviennent des armes contre elle. Doit-on s’étonner alors que l’on étudie plus pour briller que pour s’améliorer ? que même chez bien des gens la science et la sagesse ne soient que l’art de faire croire qu’on possède l’une et l’autre ? qu’en général nos savans soient des hommes sans moralité, sans caractère, sans dignité, changeant d’opinion et de ton, épiant l’occasion de se vautrer dans l’ornière de la flatterie, comme Waller, comme Monti ? car les poètes surtout ont une propension décidée à ramper ; j’en excepte Pope, Akenside, Churchill, et mon ami Joël Barlow ; citez m’en d’autres. Un nommé Kœcher imprima, en 1738, une mesquine brochure sur l’idolâtrie littéraire[1]. Un ouvrage complet, sur cette matière, serait aussi vaste que l’Encyclopédie.

J’ai toujours aimé les voyages à l’étranger ; ce sont des sciences qui s’intercalent agréablement dans le drame de la vie ; peut-être en publierai-je des fragmens qui re-

  1. Joan. Chris. Kœcheri, de Idolatria Litteraria, etc., in-8., 1738. Hanovre.