Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/392

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Une scène plus mémorable se préparait ; nous arrivâmes au 4 août. J’ignore où Dubois Crancé et d’autres ont pris que j’avais témoigné un regret sur la suppression de la dîme, qui m’avait toujours paru un fléau ; mais, comme Sieyes, comme Morellet, j’aurais voulu que la suppression ne s’opérât qu’avec stipulation d’indemnité, dont le capital eût formé la dotation du clergé.

À cette séance fameuse, je proposai et j’obtins bien vite l’abrogation des annates, monument de simonie, contre lequel avait déjà statué le concile de Bâle. Un jour que je plaisantais avec le nonce Dugnani, aujourd’hui cardinal, il me dit : « Cette affaire est consommée ; mais pourquoi avez-vous proposé cette suppression ? — Parce que les cahiers de mon baillage m’en imposaient le devoir ; et mes cahiers contenaient cette demande, parce que je l’y avais fait insérer. »

Vers cette époque nous formâmes deux sociétés qui amenèrent d’heureux résultats. L’une, où figuraient Camille Desmoulins, Brissot, Loustalot, etc., avait pour objet la liberté de la presse. J’ignore si la suite des siècles présentera en Europe le phénomène inouï d’un seul gouvernant qui ait soutenu cette liberté ; mais, en dernière analyse, je la crois aussi utile pour eux que pour le peuple, puisqu’elle les avertit de l’opinion publique, la première des puissances, et celle qui à la fin renverse ou consolide