Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/395

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de la nation, et même de la plupart des députés. Quoique le 4 août eût fait un immense abattis dans la forêt des abus, une foule d’objets appelaient encore des réformes. Mais, comme l’opinion de beaucoup de représentans n’était pas toujours au niveau de la nôtre, pour en accélérer la marche, notre tactique était simple : on convenait qu’un de nous saisirait l’occasion opportune de lancer sa proposition dans une séance de l’Assemblée nationale ; il était sûr d’être applaudi par un très petit nombre, et hué par la majorité ; n’importe : il demandait, et l’on accordait le renvoi à un comité où les opposans espéraient inhumer la question. Les Jacobins s’en emparaient. Sur leur invitation circulaire, ou d’après leur journal, elle était discutée dans quatre ou cinq cents sociétés affiliées, et trois semaines après pleuvaient à l’Assemblée nationale des adresses pour demander un décret dont elle avait d’abord rejeté le projet, et qu’elle admettait ensuite à une grande majorité, parce que la discussion avait mûri l’opinion publique.

La société des Jacobins dégénéra à tel point que quand, après un an d’absence, j’y reparus un moment, en septembre 1792, elle était méconnaissable ; il n’était plus permis d’y opiner autrement que la faction parisienne. Indigné de cette oppression, je demandai dérisoirement que désormais fût affichée à la porte l’opinion qu’on se-