Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/400

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Bientôt paraîtront en Amérique et en Allemagne les traductions allemande et anglaise de mon ouvrage sur les qualités morales et intellectuelles et sur la littérature des nègres, dont l’original est inédit.

Sieyes, Tracy, Rewbell et quelques autres plaidèrent ainsi que moi la cause de la justice ; après une incroyable résistance de la part des marchands de chair humaine, nous obtînmes enfin, ou plutôt nous arrachâmes à l’Assemblée, les instructions du 28 mars 1790 et le décret du 15 mai, qui admettaient les nègres et les sangs-mêlés à la jouissance des droits politiques et civils.

Une somme de deux millions et demi était prostituée annuellement en primes accordées par le gouvernement pour faire la traite, c’est-à-dire pour le commerce du crime ; long-temps après, sous la Convention, le 27 juillet 1793, j’obtins enfin la suppression de cette dépense scandaleuse.

Mais revenons à nos colons. Rien ne m’a donné une preuve plus complète, plus douloureuse de la perversité dont est capable l’espèce humaine que leur conduite dans cette discussion ; leur rage (car il faut nommer les choses par leur nom) était en raison inverse de leurs raisons. On conçoit qu’une des premières impostures fut que nous avions reçu de l’argent des nègres ; et quoique Raymond, l’agent des hommes de couleur à Paris, ait donné le dé-