Page:Mémoires de Grégoire, ancien évêque de Blois.djvu/401

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menti le plus formel, la calomnie qui assure toujours, disait Mirabeau, et qui ne prouve jamais, répéta et répétera peut-être la même assertion ; témoin Bertrand de Molleville, ancien ministre de la marine, qui publie à Londres des rapsodies volumineuses, vantées par les émigrés et lues je ne sais par qui. À l’entendre, des sommes considérables avaient été réparties entre Brissot, Condorcet, Pétion et moi, pour stimuler notre zèle en faveur des noirs et des sangs-mêlés[1] : j’avais même, selon quelques planteurs, touché des millions, ce qui, joint à d’autres millions de la part des juifs, devait me placer au rang des Crésus. Ces calomniateurs sont donc bien vils, puisque, jugeant sans doute d’après leur cœur, ils ne croient pas à la vertu désintéressée. Tantôt, disaient-ils, je défendais les Africains parce que j’avais une belle-sœur mulâtresse, quoique je n’eusse ni frère, ni sœur ; tantôt nous étions des hommes vendus à l’Angleterre ; telle est l’analyse de cinq à six cents libelles vomis contre nous. Je suis fâché d’avoir vu dans les rangs de mes adversaires des hommes tels que Moreau-Saint-Méry, distingué d’ailleurs par ses talens, ses écrits et ses services ; Chabanon, que je déconcertai en lui proposant de rendre compte

  1. Voir Bertrand de Molleville, Histoire de la Révolution de France, tom. VIII, pages 378 et suivantes.