Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/306

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tant le mieux possible le bruit diabolique de l’artillerie, entra avec cinq ou six gardes nationaux, menaçant celui qui attirait ainsi des obus sur la barricade.

Celui-là, c’était moi ! on m’avait enjoint de me reposer, l’oratoire touchait à la barricade, l’orgue était bon, il n’avait encore eu que quelques notes de brisées, et jamais je ne me sentis plus en verve, chacun se repose à sa façon.

À Clermont, au bruit du vent qui me faisait un orgue, j’ai noté, de souvenir, quelques mesures de cette danse des bombes.

Au repas qui fut donné chez Rochefort, en notre honneur, Daoumi, Canaque de Sifou, vint en toilette d’Européen, chapeau à haute forme — ce qui déparait sa fière tête de sauvage — et gants de peau à ses larges mains ; tout cela par un pernicieux conseil de Balzenq — sorte d’alchimiste qui s’occupait d’essence de niaouli et de chaudronnerie, dans son trou plein de creusets, se prétendant ferblantier parce qu’il était né en Auvergne — ancien rédacteur du journal de Blanqui.

Daoumi, ce lion, fort empêtré de ses pattes ainsi emprisonnées, ne pouvait ni aider Olivier Pain dans les confections du rôti, ni mettre, comme tout le monde, la main à la pâte (à n’importe quoi) ; c’est pourquoi je parvins à lui faire dire une