Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/314

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quelques jours avant l’arrivée d’un paquet de lettres à son adresse — le courrier n’étant pas encore régularisé.

Je n’avais vu Verdure qu’une fois depuis le 4 Septembre, où nous avions ensemble cueilli au jardin des Tuileries des boutures d’arbres de liberté ; ma mère en conserva une pendant plusieurs années ; elle périt à l’hiver glacial qu’il y eut peu avant notre retour.

Pauvre Verdure ! On n’avait pas eu au temps de la lutte beaucoup de temps pour voir ses amis. J’aurais bien aimé à le retrouver là et à l’aider au lieu de reprendre ses élèves.

Les camarades cultivaient des fleurs sur les tombes. Henry Lucien fit pour celle d’Eugénie Tiffaut, belle fille aux yeux bleu sombre morte à seize ans, une statue de terre cuite, respectée par les cyclones jusqu’à notre départ.

Passedouet a des couronnes venant de France ; sur la tombe d’un petit enfant, Théophile Place, pousse un eucalyptus.

Un suicidé, Muriot, dort sous le niaouli qui tord, toutes blanches, ses branches désolées comme les brins d’un spectre. En bas du cimetière s’entrelacent des palétuviers, tantôt gagnant sur l’Océan, tantôt repris par les flots ; au-dessus est le rocher de marbre rose où j’aurais