Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/449

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vail étourdit, la douleur fait marcher comme un éperon. C’est nécessaire peut-être pour fournir sa carrière.


Des fragments retrouvés dans mes papiers diront mieux que moi le terrible groupement des choses depuis 71 : toutes se tiennent, dérivent les unes des autres et m’apparaissent à la fois.

Le premier qui me tombe sous la main date du 28 novembre 1871.

C’est au camp de Satory, tout ensoleillé dans le matin sur la neige de novembre, qu’avait lieu l’assassinat de Ferré, mon compagnon d’armes ; j’aurais bien aimé y avoir ma place.

Ma mère était forte encore, relativement presque jeune. C’eût été moins cruel que la séparation d’il y a deux ans.

Voici en quels termes un journal réactionnaire raconte la mort héroïque de Ferré :


… Les condamnés sont vraiment très fermes, Ferré, adossé à son poteau, jette son chapeau sur le sol. Un sergent s’avance pour lui bander les yeux ; il prend le bandeau et le jette sur son chapeau… Les trois condamnés restent seuls. Les trois pelotons d’exécution qui viennent de s’avancer font feu.

Rossel et Bourgeois sont tombés sur le coup ; quant à Ferré, il est resté un moment debout et est tombé sur le côté droit. Le chirurgien-major du camp, M. Déjardin, se précipite vers les cadavres. Il fait signe que Rossel est bien mort et appelle les soldats qui doivent donner le coup de grâce à Ferré et à Bourgeois.

Enfin, le défilé commence…

Devant le troisième conseil de guerre, où il fut traduit en