Aller au contenu

Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

À l’automne, avec ma mère et mes tantes, nous allions loin dans la forêt.

Tout à coup, on entendait casser des branchettes : c’était quelque pauvre vieille faisant son fagot.

— Eh petiote ! le gâde as té pa lé ? Vès t’en, pa lé quiche de lé tranche, si le gâde passot tu chanteros ! faut que je féye mes écouves (balais).

Combien peu montaient ces brins de bouleau, dans les grands bois !

D’autres fois, c’était le ouf d’un sanglier rentrant dans les fourrés ou de pauvres chevreuils fuyant comme l’éclair.

On eût dit qu’ils sentaient venir les chasses d’automne où l’on égorge au son du cor tant de pauvres biches pleurant les vertes feuillées.

La bête détruit pour vivre, le chasseur détruit pour détruire, le fauve ancestral se réveille.

Maintenant, les jours d’enfance sont esquissés et voilà, étendu sur la table, le cadavre de ma vie : disséquons à loisir.