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continua de soigner pendant son long séjour dans la Haute-Marne, près de sa mère, tandis que j’étais sous-maîtresse à Paris : c’est-à-dire jusque vers 1865 ou 1866. Nous avons eu pendant peu de temps, comme on voit, le bonheur de vivre ensemble.

« Les choses ont des larmes », a dit Virgile. Je le sens en pensant au petit bois et à la vigne arrosés des sueurs de ma mère.

De là on voyait le bois de Suzerin avec le toit rouge de la ferme.

Les montagnes bleues de Bourmont ; Vroncourt, les moulins, le château ; toute la côte des blés ondulant sous le vent ; c’est ainsi que je me figurais la mer, et j’avais raison.

Ma grand’mère Marguerite voulut voir la vigne avant de mourir, mon oncle l’y porta dans ses bras.

Les Prussiens, passant comme passent tous les vainqueurs, ont coupé le bois et détruit la vigne ; une petite hutte était au milieu ; je crois qu’ils l’ont brûlée, en faisant pour se réchauffer du feu avec les arbres.

Ma mère dut vendre le terrain pendant mon séjour en Calédonie pour payer des dettes faites par moi pendant le siège et qu’on lui réclama.

Revenons au passé. Mon éducation, à part