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Page:Mémoires de l’Académie de Stanislas, 1863.djvu/91

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rités chrétiennes et de la philosophie antique, si dédaignées du siècle fameux dont le terme approchait. C’est par là que Joubert allait se rendre digne de conseiller Châteaubriand, et de fixer à son tour les regards de la postérité.

Cependant, si les événements sont assez terribles pour m’autoriser à rappeler ici une expression de l’orateur sacré, Dieu tonne du plus haut des cieux ! La voix de la révolution a couvert tout à coup des bruits frivoles, et tout se tait pour l’entendre. Ses sommations impérieuses rappellent durement à la réalité et au devoir un monde trop enivré de ses plaisirs et de la puissance de l’esprit humain. Aux éclats répétés de cette foudre, s’est éveillé tout ce qui dort de bien et de mal dans les profondeurs de l’âme humaine, l’ambition qui voit s’élargir un horizon où courent des clartés sinistres, l’enthousiasme qui ne connaît aucun obstacle, les haines sociales prêtes à verser le sang, le dévouement prêt à braver la mort, toutes les passions basses ou nobles convoquées pour prendre part à l’effrayante tragédie qui vient de s’ouvrir. Joubert, cette âme qui respira toujours la paix et l’ordre, ne pouvait avoir d’autre ambition que celle du bien. Il se borna à recevoir, du vote empressé de ses concitoyens, les fonctions de juge de paix dans sa ville natale, et honora de son intégrité la nouvelle institution judiciaire. Bientôt le déchaînement croissant de la Révolution lui rendit impossible même l’exercice de cette modeste magistrature.