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Page:Mémoires de l’Académie de Stanislas, 1863.djvu/95

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que le génie, suivant le mot d’un poëte, ne prend pas demain à l’Éternel. Cependant l’ombre même de ce passé tombé revêt un charme singulier, et semble, dans sa ruine, triompher de l’impuissance morale du présent. C’est ainsi que l’imagination et la poésie s’en emparent, et que, s’il ne leur est pas donné de satisfaire la soif des âmes, elles la trompent du moins en reproduisant cette magie des souvenirs ; c’est ainsi que Châteaubriand vint charmer ce monde livré naguère à l’ironie de Voltaire, ou à la fièvre de Rousseau, et verser le baume sur la plaie béante du lendemain des révolutions.

Mais le vrai but de l’œuvre nouvelle devait être, disait Joubert, de montrer la beauté de Dieu dans le christianisme, afin de ranimer le sentiment éteint des magnificences de la religion, et de disposer l’homme à ses enseignements. C’est un rare exemple, et qui mérite l’attention de la postérité, que celui de cette critique utile, amie, dévouée à l’œuvre qui se prépare, et intervenant dans son cours comme un conseil éclairé. Joubert la fondait sur l’observation de l’esprit du temps, aussi bien que sur la nature du talent de son ami. Il avait dit en philosophe qu’à la critique destructive du siècle précédent il fallait opposer l’étude et l’esprit d’assentiment, celui qui ne cherche pas à couvrir le passé de ridicule et de mépris, mais veut s’en rendre un compte exact, mettre à profit ses leçons, et qui, demandant plus de lumières et un savoir plus complet,