Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/303

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nous fîmes l’application de cette idée aux dents incisives, lesquelles nous parurent effectivement justement caractérisées par leur insertion dans l’os intermaxillaire. Nous trouvions ainsi à nous soustraire à l’arbitraire d’une décision, s’il se présentait une anomalie difficile à ramener à la généralité.

Ce fut d’abord en 1795, et dans notre mémoire sur une nouvelle classification des mammifères, que, M. Cuvier et moi, nous employâmes notre règle nouvelle au sujet des incisives.

Les livres linnéens tenaient les défenses de l’éléphant au rang des dents canines : dentes primores nulli ; laniarii superiores elongati. Notre règle voulait, et à cause de notre règle nous donnâmes cette détermination : l’éléphant a en haut deux énormes incisives. Tous les caractères assignés aux dents par les auteurs systématiques furent depuis et de la même façon revus et remaniés. On avait écrit au sujet des hérissons : dentes primores duo, mais la suture de l’intermaxillaire ayant été vue comme reportée assez loin en arrière, il fallut dire des hérissons qu’ils avaient non plus deux incisives, mais bien six.


    peau, ainsi qu’un poil, et qu’un nom primordial et commun doit être appliqué à ces deux produits d’où le nom de phanère, qu’il proposa pour exprimer cette idée générale. Les dents naissent de la peau à quelque distance de la portion osseuse qui leur servira de lit, et qu’on appelle déjà, mais par anticipation, leurs alvéoles. Ainsi par une habitude qui ne fut point réfléchie, on attribua à un cas fortuit et contingent le caractère d’une causalité que nous savons aujourd’hui tout-à-fait étrangère à l’effet produit. Que la dent soit placée au-devant d’une fosse ou d’une capsule, la racine de cette dent s’y enfoncera : mais que ce soit au-devant d’un maxillaire terminé par un biseau aigu, cette racine se prolongera en dedans ou en dehors de la surface lamelleuse. C’est que la dent est indifférente à la nature du tissu osseux pour ne rester assujettie qu’à la condition de sa forme ; elle va, par sa racine qui gagne de la longueur, au-devant de l’os, comme celui-ci, en