Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/330

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une explication de toute évidence. L’illusion est telle, quant à ce qui reste de la tête, qu’on interroge sa mémoire, qu’on cherche à se rappeler où l’on a vu, et décidément qu’on veut savoir chez quel rongeur se trouve un tel crâne. Je réservais cette preuve pour en faire ma dernière démonstration.

Il est d’abord un moyen de pénétrer le secret de toutes ces transformations animales, c’est d’opérer spéculativement à l’égard d’une espèce : et je ne fais là que préjuger sur un point ce que sur plusieurs autres espèces la nature laisse apercevoir très-distinctement, et se trouve avoir comme accordé à notre instruction. Dans l’exposé suivant est le développement de la pensée qui précède. On connaît plusieurs sangliers, ceux entre autres que M. Frédéric Cuvier a séparés à titre de sous-genre, sous le nom de phacochère, qui n’ont que deux seulement ou bien qui n’ont même pas du tout de dents incisives à la mâchoire supérieure : les individus apportés du cap Vert possèdent ordinairement de ces dents, quand ceux venus du cap de Bonne-Espérance en sont privés ou presque toujours privés. Gmelin avait établi deux espèces nominales, pour ceux du cap Vert, l’espèce sus africanus, et pour les seconds, celle sus œthiopicus : c’est le même animal chez lequel la défense devient démesurément grande. Or ce n’est ici qu’un cas de déplacement des matériaux formateurs, et par conséquent qu’une nouvelle application de notre loi du balancement des organes : car si ce n’est toute, c’est la plus forte partie des fluides nourriciers, ailleurs départie à six incisives, qui, chez le plus féroce des sangliers, se trouve ainsi détournée au profit d’une autre sorte des parties dentaires[1].

  1. J’ai craint de fatiguer en prolongeant davantage cette revue du sys-