Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/555

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Le haut prix de ces bains de luxe ne laissait au peuple que l’usage des bains froids, pris pendant l’été sur la rivière ; aussi était-il devenu plus général. Chacun des établissements où les baigneurs se réunissaient, consistait en un de ces grands bateaux appelés toues, auquel une grande toile à voile servait de toiture. Cette toile s’étendait au dehors du bateau et le long de ses bords, jusqu’à des pieux battus dans la rivière, auxquels elle venait s’attacher. Elle formait ainsi une espèce d’appentis ou de galerie extérieure, sous laquelle le fond de la Seine était sablé, et dressé de telle sorte que l’on pouvait s’y baigner sans danger[1].

C’était dans l’intérieur même du bateau que les baigneurs déposaient leurs vêtements, et les confiaient aux soins d’un gardien.

La faible rétribution à laquelle était fixé le prix de ces bains les mettait à la portée d’un trop grand nombre de personnes, pour appeler à les fréquenter cette classe moyenne des habitants de Paris, qui tient autant à jouir des aises de la vie qu’à s’en procurer la jouissance aux moindres frais possibles. Il était probable qu’en entrant dans les convenances de cette classe, on ferait une spéculation utile. Un baigneur-étuviste nommé Poithevin, qui demeurait sur le quai d’Orsay, en conçut le projet vers l’année 1760. Il imagina de transporter sur un grand bateau construit exprès, un établissement à peu près semblable à celui qu’il exploitait

  1. Dictionnaire raisonné universel des arts et métiers. Voy. nouvelle édition, revue et mise en ordre par l’abbé Jaubert de l’Académie royale des sciences de Bordeaux, au mot Baigneur. (Paris, Didot jeune, 1773.)