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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 15.djvu/12

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iv
ÉLOGE HISTORIQUE

une science qu’enseignait un aussi grand maître, et qui, d’ailleurs, est, en elle-même, remplie de tant d’attraits. Mais il y mêlait ce goût, si commun alors, pour les systèmes, pour la dispute à laquelle les systèmes se prêtent si bien, en un mot, pour tous les restes de l’ancienne scolastique, goût qui a régné si longtemps encore dans les écoles, après avoir été flétri par les Académies et les esprits sages, et qui, pendant si longtemps, a été le fléau mortel des bonnes études.

Un pareil goût ne pouvait exercer sans doute un long empire sur une raison aussi ferme que l’était déjà celle du jeune Chaptal ; et une circonstance heureuse y mit une prompte fin. M. Pinel, que nous avons vu depuis porter un esprit de critique si sûr et si éclairé dans la médecine, perfectionnait alors, à l’école de Montpellier, ses premières vues et ses premiers essais de réforme. Chaptal et lui se lièrent d’une amitié vive ; Pinel était le plus âgé des deux ; il résolut de guérir son jeune ami ; et, pour le désabuser à jamais de tous ces rêves de l’imagination, décorés du nom de systèmes, il lui conseilla la lecture réfléchie, et pour un certain temps exclusive, de trois auteurs, tous trois modèles immortels dans l’art d’observer Hippocrate, Plutarque et Montaigne. « La lecture de ces trois philosophes, » dit M. Chaptal, dans les Notes que je citais tout à l’heure, « lecture que nous faisions très-souvent en commun, Pinel et moi, opéra sur mon esprit une révolution complète ; et dès lors, ajoute-t-il, je pris en aversion toutes ces subtilités scolastiques qui n’ont d’autre but que de tendre des pièges à la raison. »

Il a fallu que M. Chaptal nous instruisît lui-même de ce