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histoire de l’académie,

das, dans la province de Sainte-Marthe ; Cabral et Pigafetta, au Brésil : mais, par une singularité remarquable, il était inconnu dans l’Amérique septentrionale, et dans toutes les provinces situées sur la mer du Sud ; c’est parce qu’on a transporté le nom de juca à l’arum virginiuem, que l’on a cru le manioc cultivé par les habitants de la Floride.

Comme le manioc venu de graines n’a pas de racines tubéreuses, il n’est pas probable qu’il se soit répandu dans le vaste espace qu’il occupe par les agents naturels ; ce sont plutôt les peuples qui se le sont transmis les uns aux autres.

Une ancienne tradition des Haïtiens, rapportée par Pierre Martyr, pourrait faire croire qu’il était primitivement naturel de Saint-Domingue ; mais aujourd’hui on ne l’y trouve plus à l’état sauvage ; et M. de Jonnès, ayant comparé les dénominations par lesquelles les différentes peuplades désignent le manioc et ses préparations, les a trouvées plus nombreuses au Brésil qu’ailleurs, et a reconnu que celles dont on se sert plus au nord et en moindre nombre, dérivent de celles du Brésil : d’où il conclut que c’est ce dernier pays qui est la vraie patrie du manioc, et la contrée où il a été d’abord cultivé et employé par les hommes. Ce qui le confirme dans cette idée, c’est que c’est aussi au Brésil que le manioc a produit le plus grand nombre de variétés, et qu’il y en avait déjà vingt-trois du temps de Margrave, tandis que les galibis de la Guyane n’en ont jamais eu que six ou sept, et les Caraïbes que quatre ; Saint-Domingue n’en possédait que deux quand on le découvrit. Selon M. de Jonnès, c’est dans la chaîne des Andes, et dans le peu de communication des habitants des Antilles avec le Mexique et la Floride, qu’il faut chercher les causes qui ont limité la propagation du manioc à l’espace où