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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 8.djvu/225

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il y avait une moitié, celle de la science, où le succès ne dépendait que de lui-même ; mais il en était un autre où il ne pouvait l’espérer que du concours d’une multitude de volontés, que l’on sait assez ne pas se mettre aisément d’accord.

Sur une invitation de Gluck, et en partie avec les avis de ce grand maître, il avait composé la musique d’un opéra[1]. Après deux ou trois ans de travail et de sollicitations, il en avait obtenu une première répétition ; deux ans encore après on en fit la répétition générale ; les acteurs, l’orchestre et les assistants lui présageaient un grand succès, lorsque l’humeur subite d’une actrice fit tout suspendre. M. de Lacépède supporta cette contrariété conformément à son caractère, avec douceur et politesse ; mais il jura à part lui qu’on ne l’y prendrait plus, et il se décida à ne faire désormais de la musique que pour ses amis.

On aurait regret à cette résolution, si de la théorie que se fait un artiste on pouvait conclure quelque chose touchant le mérite de ses œuvres. La poétique de la musique que M. de Lacepède publia en 1785[2] annonce un homme rempli du sentiment de son art, et peut-être un homme qui accorde trop à sa puissance ; elle se fonde essentiellement sur le principe de l’imitation : la musique, selon l’auteur, n’est que le langage ordinaire dont on a ôté toutes les articulations, et dont on a soutenu tous les tons en les élevant aussi haut ou en les portant aussi bas que l’ont souffert les voix qui devaient les former et l’oreille qui devait les saisir, et en leur

  1. C’était l’opéra d’Omphale. Il avait aussi commencé à travailler sur celui d’Alcione.
  2. Deux vol. in-8o.