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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 8.djvu/234

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se faire répéter la demande. Il est certain qu’une heure de séjour dans la capitale eût été l’arrêt de mort de M. de Lacépède. Des hommes qui souvent avaient reçu ses bienfaits à sa porte, et qui ne pouvaient juger de ses sentiments que parce qu’ils avaient entendu dire à ses domestiques, étaient devenus les arbitres du sort de leurs concitoyens : ils en avaient assez appris pour connaître sa modération, et à leurs yeux elle était un crime ; sa bienfaisance en était encore un plus grand, parce que le souvenir en blessait leur orgueil. Déja plus d’une fois ils avaient cherché à connaître sa retraite, et il se crut enfin obligé, pour ne laisser aucun prétexte aux persécutions, de donner sa démission de sa place au Muséum. Ce ne fut qu’après le 9 thermidor qu’il put rentrer à Paris.

Il revint avec un titre singulier pour un homme de quarante ans, déja connu par tant d’ouvrages : celui d’élève de l’école Normale.

La convention, abjurant enfin ses fureurs, avait cru pouvoir créer aussi rapidement qu’elle avait détruit ; et pour rétablir l’instruction publique, elle avait imaginé de former des professeurs en faisant assister des hommes déja munis de quelque instruction aux leçons de savants célèbres qui n’auraient à leur montrer que les meilleures méthodes d’enseigner.

Quinze cents individus furent envoyés à cet effet à Paris, choisis dans tous les départements, mais comme on pouvait choisir alors quelques-uns à peine dignes de présider à une école primaire ; d’autres égaux pour le moins à leurs maîtres par l’âge et la célébrité. M. de Lacépède s’y trouvait sur les bancs avec M. de Bougainville, septuagénaire, officier-général de terre et de mer, écrivain et géomètre également fameux ;