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DERNIERE MALADIE DE LOUIS xviii

de ceux contre les folies desquels il luttait depuis trente années.

Louis XVIII avait coutume de dire qu’un roi de France ne se devait aliter que pour mourir. Il s’est montré fidèle à ce principe ; car, entre le 25 août et le 16 septembre, dernier jour de sa vie, il a encore paru en public et tenu deux fois sa Cour.

Peut-être un motif plus personnel stimulait-il aussi son courage. Je tiens du docteur Portal, son premier médecin, qu’il lui avait demandé, l’année précédente, comment il mourrait. Portal avait cherché à éloigner ce discours, mais le Roi l’y avait ramené.

« Ne me traitez pas comme un idiot, Portal. Je sais bien que je ne peux pas vivre longtemps, et je sais que je dois souffrir, peut-être plus qu’à présent. Ce que je voudrais savoir, c’est si la dernière crise de mon mal pourra se dissimuler ou s’il me faudra rester plusieurs jours à l’agonie ?

— Mais, Sire, selon toute apparence, la maladie de Votre Majesté sera très lente et graduelle ; cela peut durer bien des années.

— Je ne vous demande pas cela, reprit le Roi avec humeur. Lente et graduelle ! Je n’ai donc pas l’espoir qu’on me trouve mort dans mon fauteuil ?

— Je n’y vois aucune apparence.

— Il n’y aura donc pas moyen d’éviter les surplis de mon frère ? » grommela le Roi entre ses dents après un instant de silence. Puis il parla d’autre chose.

Il parait que ses répugnances ne s’étaient pas affaiblies, car il accueillit avec une froideur marquée toutes les insinuations de ses entours pour chercher du soulagement à ses maux dans l’assistance de l’Église.

Madame la duchesse d’Angoulême, ayant hasardé une démarche plus directe, reçut, pour réponse, un sévère :