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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome III 1922.djvu/168

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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

police s’y opposa vivement. Une rixe s’engagea ; l’esprit de parti l’envenima. Dans le tumulte, la bière tomba et, dit-on, se brisa. Il y eut au moins beaucoup de scandale, et un spectacle aussi affligeant que blessant pour la famille.

Le corps entier de la pairie se tint pour offensé et demanda des explications. Cet incident contribua à augmenter l’alliance qui se formait entre le pays et la Chambre des pairs.

Ce mauvais génie, qui présidait au sort de la branche aînée, inspira, en appelant à son aide la colère et la précipitation, une résolution dont peu de personnes sentirent la portée, mais qui, plus que toute autre, a contribué à la chute du vieux trône, démoli en quelques heures trois années plus tard.

Au printemps de 1827, la bourgeoisie de Paris paraissait assez mal disposée contre le gouvernement pour qu’on dût hésiter à réunir la garde nationale et à la faire passer en revue par le Roi.

Après de longues délibérations on s’y décida : le Roi se rendit au champ de Mars. Il fut, en général, mieux accueilli qu’on ne l’espérait. Un garde national ayant crié : « À bas les ministres ! » le Roi arrêta son cheval et dit, d’un ton calme et digne : « Je ne viens pas ici pour recevoir des conseils, mais des hommages. Faites sortir cet homme des rangs. » Cet acte de force eut grand succès, comme tout ce qui annonce de l’énergie et de la volonté dans les chefs des empires ; les cris de « Vive le Roi » fendirent l’air.

En descendant de cheval aux Tuileries, Charles X était fort content de sa matinée. Il chargea le maréchal Oudinot de faire rédiger un ordre du jour où, en témoignant du mécontentement de quelques cris isolés qui s’étaient fait entendre sur son passage, on vanterait