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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome III 1922.djvu/169

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LA GARDE NATIONALE LICENCIÉE

cependant la bonne tenue et l’excellente attitude de l’immense majorité de la garde nationale.

Le Roi répéta deux fois : « Dites que je suis très content ». Monsieur le Dauphin tint le même langage. Toutes les personnes qui faisaient partie de l’état-major avaient reçu la même impression et la répandirent dans la ville. J’en vis plusieurs dans la soirée. Le propos, généralement répété, était que la revue avait été superbe et le Roi parfaitement accueilli.

Toutefois la calèche, où les princesses se trouvaient, avait été constamment suivie par un groupe de populace qui les avait assez mal traitées de propos et presque huées. Tous les partis se sont mutuellement accusés d’avoir préparé cette manifestation hostile.

Le soir, madame la duchesse de Berry s’en expliquait en termes très courroucés. Lorsque le Roi et Madame arrivèrent chez elle où se tenait la Cour, elle porta plainte à Charles X. Madame la Dauphine, interpellée à son tour, répondit avec sa sécheresse accoutumée que cela avait été assez mal, mais qu’elle craignait pire. Le Roi ne fit qu’un seul rubber de whist, et retourna chez lui où monsieur de Villèle l’attendait.

Dans la nuit, le maréchal Oudinot fut réveillé. Le Roi lui envoyait, au lieu de la rédaction de l’ordre du jour fait selon ses ordres et soumis à son approbation, l’ordonnance qui cassait la garde nationale. Au même instant, la garde royale s’emparait des corps de garde de la garde nationale, en expulsait les bourgeois qui s’y trouvaient et poussait la grossièreté jusqu’à jeter hors la porte les armes et fournitures des gardes nationaux absents dans le moment. Cette insulte sema dans le cœur de la population de Paris un germe de haine dont les fruits se trouvèrent mûrs en 1830.

Voici ce qui l’avait provoqué. Une des légions, en