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LA PRINCESSE D’HÉNIN

Madame de Poix, très touchée de l’état de madame d’Hénin, écrit en toute hâte qu’elle a passé une assez bonne nuit et fait entrer le valet de chambre pour lui remettre son billet :

« Allez vite porter ma réponse à madame d’Hénin… Elle a donc passé une bien mauvaise nuit ?

— Je ne sais pas, princesse.

— Était-elle bien souffrante ce matin ?

— On n’était pas entré chez elle quand je suis parti.

— Elle ne vous a donc pas donné sa lettre elle-même ?

— Si fait, princesse, la princesse me l’a remise hier au soir. »

Madame de Poix rit un peu des frissons de son amie, mais cela ne changea rien à leur intimité qui s’est prolongée jusqu’à la mort. Il faut ajouter que madame d’Hénin était la plus affectée de toutes ces dames, et madame de Poix la plus naturelle aussi bien que la plus aimable et la plus raisonnable.

Madame de Simiane, dont j’ai déjà parlé au sujet de monsieur de Lafayette, avait été la jolie femme par excellence de la Cour de Louis XVI et conservait une grande élégance, beaucoup d’agrément et tout autant d’esprit qu’il en fallait pour être encore charmante dans sa gracieuse bienveillance.

Madame de Chalais, avec plus d’esprit, n’avait pas le même besoin de plaire, mais cependant beaucoup de bonté.

La comtesse Charles de Damas, moins vieille que ces autres dames et dont l’intimité était de relation plus que de sympathie, a toujours passé vis-à-vis de ses contemporaines pour avoir prodigieusement d’esprit. Je n’en ai jamais vu trace ; mais je me récuse, ne pouvant avoir raison contre l’opinion générale. Toujours gémissante,