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SAGESSE DE MONSIEUR LE DAUPHIN

mesure à de nouvelles élections, monsieur de Villèle comptait s’assurer un long bail ministériel.

Monsieur le Dauphin se tenait en dehors de ces intrigues. Respectueusement soumis aux ordres du Roi, il ne témoignait aucune hostilité à son ministre, mais encore bien moins de faveur. Il se bornait à faire de son mieux ce dont on le chargeait spécialement. Il était à la tête de l’administration des prisons et tenait quelquefois des assemblées où les intérêts de ces établissements étaient discutés devant lui. Il présidait avec beaucoup de convenance et de sagesse, et ne manquait pas une occasion d’exprimer des sentiments élevés et libéraux.

J’ai souvent vu des personnes, sortant de ces réunions, enchantées de monsieur le Dauphin. Je citerai entre autres monsieur Pasquier et monsieur Portal dont les suffrages valent bien la peine d’être comptés.

Dans le même temps, monsieur le Dauphin tenait un conseil militaire où il obtenait aussi d’honorables approbations. On lui reconnaissait des idées saines, accompagnées d’une grande modération et d’un esprit d’impartialité, fort recommandables dans un prince vivant d’une façon si isolée et d’une dévotion si éminente.

Quoiqu’elle n’aimât pas les prêtres, madame la Dauphine était plus sous l’influence de ses entours.

Madame la duchesse de Berry en voulait à monsieur de Villèle de ce qu’il ne faisait, ni assez vite, ni assez violemment, toutes les extravagances qu’elle et sa petite coterie ultra nobiliaire rêvaient ; mais elle était trop légère et trop occupée de ses plaisirs pour travailler sérieusement contre lui ; elle se bornait à des sarcasmes qui commençaient à amener un sourire sur les lèvres du Roi, au lieu de la réprimande qu’elle aurait subie quelques mois plus tôt.