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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

procédés généreux, et il proposa de diriger la Capricieuse sur Trieste ; mais monsieur Guizot, nouvellement arrivé aux affaires par l’obstinée exigence du duc de Broglie, avait peu de poids vis-à-vis de ses collègues, et la détention à Blaye fut décidée à une unanimité où il se rangea.

Je ne lui en sus pas moins un très grand gré, dans le temps, et le lui témoignai vivement. Peut-être mon approbation dépassait-elle son mérite. Il avait pu facilement reconnaître le vœu intime du Roi et prenait, dès alors, l’habitude de s’associer à la pensée du monarque, de la faire sienne et de l’habiller en paroles magnifiques. C’est l’origine et l’explication d’une faveur qui ne peut que s’accroître.

Dans la cachette même, où s’était réfugiée madame la duchesse de Berry, on trouva les deux sacoches de cuir désignées par Deutz, renfermant ses papiers les plus importants. Elles étaient réunies par une bretelle et la suivaient dans toutes ses pérégrinations soit sur le col de son cheval, soit sur les épaules d’un guide.

Si on avait recherché les violences, il y avait de quoi porter le trouble et la proscription dans une multitude de familles ; mais on n’en fit aucun usage. C’est là où l’on trouva les lettres de mesdames de Chastellux et de Bauffremont engageant madame la duchesse de Berry à se rendre à Paris et offrant de l’y cacher. J’ignore si elles ont eu connaissance de cette découverte.

Ces sacoches renfermaient des documents qui excusaient la folle entreprise de la descente en France. De nombreux correspondants annonçaient cent mille hommes dans le Midi et deux cent mille dans l’Ouest, armés, organisés, prêts à se déclarer au premier signal. L’arrivée de « Madame » enfanterait en outre des légions innombrables dans tout le royaume.

Les correspondants les plus raisonnables, en pré-