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EXPÉDITION DE LA DUCHESSE DE BERRY

sentant le pays comme dans un fâcheux état de calme, admettaient que la présence de la princesse exciterait sans doute un grand mouvement d’enthousiasme, et pourrait faire jaillir la flamme de ces masses inertes.

Ajoutons à ces appels que madame la duchesse de Berry avait constamment entendu reprocher aux princes de la Maison de Bourbon de ne s’être point associés aux travaux de la Vendée ; et peut-être excusera-t-on son esprit aventureux d’avoir cru faire de l’héroïsme en débarquant sur la plage de Marseille et en se jetant dans la Vendée. Il est au moins certain qu’à Nantes elle supporta royalement le revers de sa fortune et la chute de ses espérances.

Le cabinet, car il y en avait un sérieux et de véritable importance dans ce temps-là, le cabinet, donc, tint parole à monsieur le duc d’Orléans. À peine la duchesse de Berry arrêtée, le prince, accompagné de son frère le duc de Nemours, se rendit à l’armée qui franchissait la frontière. Il n’entre pas dans mon sujet de le suivre au siège d’Anvers où il commença la brillante carrière due à sa distinction personnelle, autant qu’à son haut rang, et s’empara de tous les cœurs par sa valeur, sa bonne grâce et son affabilité.

Nul, et je n’en excepte ni monsieur Thiers ni même monsieur Maurice Duval, ne ressentit une plus vive satisfaction de l’arrestation de madame la duchesse de Berry que monsieur de Chateaubriand. Son rêve sur le séjour de Lugano s’était dissipé en y regardant de plus près.

Cette presse libre, dont il espérait tirer de si splendides succès pour sa cause et surtout pour sa famosité personnelle, se trouvait soumise aux caprices d’un conseil de petits bourgeois, relevant lui-même d’une multitude intimant ses volontés à coups de pierres. On se procurerait une fort bonne chance d’être lapidé, dans une