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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome I 1921.djvu/413

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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

pense de lui ; quelque chose qu’il en coûte, jamais je ne sacrifierai un autre à ma tranquillité. — L’ouragan d’hier a cessé, mais l’orage m’a fait un mal affreux et je suis aujourd’hui à peine en état de tenir ma plume : sans maladie quelconque, j’ai eu un mal aux nerfs horrible ; ce matin j’étais en si mauvaise disposition que mon bain m’a fait un très mauvais effet, mais je veux vous écrire parce que la poste ne part pas demain. Je suis bien anxious aussi de voir ma petite Georgine ; sa mère doit recevoir une lettre de moi aujourd’hui, mais apparemment que je dois m’en prendre à la poste, car je n’en ai pas d’elle. — Adieu, bonne maman, ma tête tourne tant que je m’arrête. Dites à William qu’il n’a rien fait pour me déplaire, que j’en suis parfaitement contente, que, s’il a perdu sa place, je n’y suis pour rien et enfin que je suis disposée à faire tout en mon pouvoir pour lui en procurer une autre.


samedi, 17 août.

Je suis presque fâchée d’avoir expédié ma lettre d’hier, car j’étais si souffrante qu’elle a dû s’en ressentir et, peut-être, vous inquiéter. J’hésitais à savoir si je me baignerais ce matin, mais le temps a fixé mes incertitudes attendu que le coup de vent de jeudi n’est rien en comparaison de celui d’aujourd’hui : je crois, en vérité, que tous les vaisseaux des Dunes vont nous arriver ; le port est un vrai chaos ; les bâtiments se brisent, chassent sur leurs ancres, heurtent contre le pier ; enfin, c’est absolument la sortie de l’Opéra. — Voila la poste et une lettre de vous, cher papa. Vous vous trompez, la mer n’était guère plus forte jeudi que le dimanche où vous m’avez fait baigner, c’était le vent qui occasionnait le danger, s’il y en avait toutefois. Je suis presque tentée de ne me baigner que lundi, car, hier, la mer encore troublée par l’orage de la veille m’a paru désagréable et, je crois, m’a fait mal ; les mêmes causes existant, j’appréhende les mêmes effets pour demain ; il me semble que ce raisonnement est conséquent ! — Pourquoi serait-il question de ce lait d’ânesse ? tout au plus, je n’aurais pu en prendre qu’une fois ; vous