Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/160

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banquier d’Agen, propriétaire du château du Saumon, dans mon arrondissement, pour qui l’Évêché ne pouvait manquer d’obtenir bon nombre des voix légitimistes, contre le protestant Duthil.

J’eus beau dire : — « Mais c’est une guerre de religion que vous risquez d’allumer dans un pays où, jusqu’à présent, catholiques et protestants vivent en paix ! Vous allez réveiller, d’ailleurs, par une candidature agenaise, des rivalités locales que je me suis toujours efforcé d’amortir ! » Rien n’y fit.

De Nérac, j’écrivis à M. Duchâtel le résumé de cette entrevue, et je finis ma lettre ainsi : « M. le Préfet vient de me donner, au nom de Votre Excellence, des instructions me paraissant inconciliables avec celles que j’ai reçues d’Elle directement et suivies de point en point. Je La prie de m’accorder un changement de résidence, et d’envoyer, à Nérac, un Sous-Préfet plus libre de faire ce dont il s’agit maintenant. »

Le Ministre me répondit que mon départ serait un coup funeste pour la nouvelle candidature substituée à celle de M. de Vigier, afin d’écarter sûrement M. Duthil, contre lequel il existait, dans sa conviction, de justes sujets de défiance ; qu’il comptait sur mon dévouement au Roi, dont une ardente Opposition battait le pouvoir en brèche, pour prêter, au contraire, à son Gouvernement, dans une circonstance si délicate, « le concours de l’habileté politique témoignée par ma correspondance », tout en gardant la réserve extrême que m’imposaient les faits passés, et qu’il admettait complètement.

Je pus l’aviser, en retour de sa lettre, « autographe », comme les précédentes, du désistement de M. de Vi-