Page:Mémoires du Baron Haussmann, tome 1.djvu/202

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Mais, quel magique panorama ! Au sud, devant nous, de l’autre côté de la vallée d’Aran, la Maladetta se présentait, au soleil couchant, sous un nouvel aspect. On voyait se profiler après elle, à l’ouest, la série des pics renommés de la grande chaîne des Pyrénées : le Cylindre, le mont Perdu, le Vignemale, le pic d’Ossau, et, s’en détachant au nord, comme un colonel devant sa troupe, le Pic du Midi de Bigorre. En effet, le Crabère forme l’extrémité d’une chaîne secondaire, continuant, au nord de la vallée d’Aran, la direction de l’est à l’ouest, que la grande quitte brusquement, au mont Vallier, pour aller la reprendre plus au sud. Nous nous y trouvions donc admirablement postés pour suivre des yeux la ligne des Hautes Pyrénées, fuyant vers l’horizon lointain. Au nord, la vue embrassait un immense espace. On suivait le cours de la Garonne au delà de Toulouse, jusqu’à la ligne de coteaux qui la borde, dès qu’elle prend son cours au nord-ouest, vers Agen et Bordeaux. Le Capitaine prétendit même, au moyen d’une longue-vue qu’il tira de sa poche, me faire discerner le pont de Toulouse.


À l’ouest, au delà du sol tourmenté des départements des Hautes-Pyrénées et du Gers, une ligne noire semblait indiquer le plateau des landes de Gascogne. À l’est, nous avions la masse des montagnes de l’Ariège, bien connues de nous. Et sous nos pieds, pour ainsi dire, à 1,200  mètres de profondeur, le lac d’Areins, et, sur ses bords, nos compagnons, petits, petits, qui gesticulaient, mais dont les appels n’arrivaient pas jusqu’à nous, on le comprend.

Après avoir reconnu ce que nous voulions vérifier : la nécessité de faire observer un passage entre le Cra-