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mémoires du maréchal joffre

un niveau plus élevé et d'assurer un meilleur entraînement à nos réservistes ; par contre, il aurait eu l'inconvénient d'empêcher la réunion, en vue de leur instruction, des formations de réserve ; il aurait aussi jeté un trouble profond dans la vie sociale du pays et dans notre organisation militaire.

Le service de vingt-sept mois, avec incorporation au 1er juillet, aurait permis d'avoir des recrues mobilisables dès le 1er octobre. Mais ce système aurait enleé une partie de leurs cadres aux unités instruites pendant la période d'été favorable aux exercices d'ensemble et aux manœuvres. D'ailleurs, ce système ne résolvait pas le problème des effectifs.

Le service de trente mois aurait donné dans toutes les armes des unités pléthoriques en hiver au moment où se donne l'instruction individuelle, et où, pour des raisons d'hygiène, le travail doit être modéré. L'été venu, au contraire, les unités seraient retombées dans leur situation actuelle, précisément à l'époque où l'instruction est la plus active.

Quant au système de l'appel biennal en octobre et en avril, il semblait devoir apporter un trouble profond dans notre organisation, et nous mettre en état de constante infériorité vis-à-vis de l'Allemagne.

Ainsi toutes les études entreprises tendaient à nous convaincre que la seule solution admissible était le service de trois ans intégral et obligatoire pour tous.

C'est dans ces conditions que, le 4 mars 1913, à l'Élysée, la question du principe de la loi de trois ans fut soumise au Conseil supérieur de la Guerre. Pour la première fois, M. Poincaré présidait comme chef de l'État. M. Briand, président du Conseil, et M. Étienne, ministre de la Guerre, y assistaient.

J'exposai que les mesures allemandes prises en 1911 et 1912 portaient l'armée active à 800 000 hommes sur le pied de paix ; dans ces conditions, elle n'aurait pour se mobiliser qu'à recevoir un complément de chevaux ; cette mobilisation accélérée des vingt-cinq corps d'armée allemands