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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/125

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mémoires du maréchal joffre

que nous puissions aller à la bataille décisive avec tous nes moyens réunis. En effet, en raison de la courte durée des premières batailles, nos réserves n'auraient le temps d'y participer que si elles se trouvaient à pied d'oeuvre. Or, dans le plan XVI, et dans sa première variante, l'armée de réserve ou armée de Paris était maintenue à plusieurs marches en arrière ; par suite des charges incombant aux réseaux ferrés, elle aurait à se porter par voie de terre du côté où son intervention serait décidée : son mouvement devant durer plusieurs jours, il était presque certain qu'elle n'arriverait dans la zone des opérations qu'après que la première grande bataille aurait été perdue ou gagnée. Dans ces conditions il me paraissait indispensable de la rapprocher du front et de la mettre à portée d'intervention.

D'autre part, pour éviter de voir les premiers chocs se livrer sur notre sol, il fallait éviter d'être devancés dans notre concentration par les Allemands ; il fallait réunir sur le front du nord-est le maximum de nos ressources, en y comprenant nos 14e et 15e corps des Alpes et nos troupes d'Algérie et de Tunisie, puisque la situation politique le permettait.

Par-dessus tout il fallait se mettre en mesure de parer à une violation de la Belgique par l'Allemagne.

Sur ce dernier point, en effet, les renseignements que nous recevions concordaient avec les raisonnements que nous pouvions faire sur les intentions probables de l'état-major allemand. En particulier, lorsque nous cherchions à pénétrer les raisons du développement extraordinaire donné depuis un certain nombre d'années au système fortifié d'Alsace-Lorraine, nous arrivions à des conclusions suggestives.

En effet, ce système fortifié se présentait sous la forme suivante : en Alsace, une organisation du Rhin entre Strasbourg et la frontière suisse combinée avec un barrage complet de la plaine d'Alsace ; en Lorraine, une vaste région fortifiée englobant Metz et Thionville, assurant l'inviolabilité de la Moselle entre la frontière française et celle du