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mémoires du maréchal joffre

le général Bonneau n'avait pas compris le rôle qu'il devait jouer. Il ne s'agissait pas de couverture, mais d'une opération nettement offensive ; cette extrême lenteur et cette indécision étaient de nature à compromettre le succès d'un opération dont j'attendais, en plus d'un effet moral important, une sécurité pour la manœuvre ultérieure de la 1re armée en Basse Alsace. J'en fis télégraphiquement l'observation au général Dubail en lui demandant d'examiner si le commandant du 7e corps avait bien les aulités voulues pour remplir sa mission. Il semblait bien que, dans toute cette région, rien ne menaçait sérieusement le flanc droit du détachement d'Alsace, dont j'avais été amené à élargir la mission pour la faire rentrer dans le cadre des instructions données aux armées de droite.

En effet, depuis la veille, les renseignements nous étaient parvenus en assez grand nombre sur les corps d'armée allemands de l'ensemble du front. Cela s'expliquait aisément, puisque les premiers transports de concentration de nos adversaires devaient, d'après nos prévisions, commencer le sixième jour de la mobilisation allemande, c'est-à-dire le 7 août. Dans ces conditions, nous pouvions admettre que cette concentration ne serait pas terminée avant le 13, date que nous avions admise dès le début comme probable.

Grâce aux premières identifications obtenues, on pouvait se faire une première idée de la concentration ennemie.

Il importe ici de rappeler qu'à cette époque, nous portions nos recherches tout particulièrement sur les corps d'armée actifs, estimant que les unités de réserve ne viendraient que sous la force d'appoint de deuxième ligne. Il nous semblait que si nous arrivions à déterminer les emplacements des grandes unités actives, nous aurions ainsi précisé l'économie générale du dispositif ennemi. Cette tendance à n'attribuer aux unités de réserve qu'une valeur secondaire a eu, il faut le reconnaître, une influence considérable sur le développement des opérations. Elle dérivait de cette idée assez généralement admise, dans les années précédentes, que la guerre, devant être courte et