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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/274

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mémoires du maréchal joffre


d'autant plus nécessaire de rétablir la vérité que la presse suisse annonçait un grave échec français en Alsace ; elle prétendait que nos tués et blessés avaient dépassé 20 000 hommes, c'est-à-dire plus que nous n'avions engagé de combattants. L'impression produite était très forte, et il fallait au plus tôt couper court à cette légende.

Ce fut le 11 août vers midi que je pris la décision de fixer au 14 l'attaque de la 1re armée et des corps de droite de la 2e ; cette date correspondait à la fin de nos transports de concentration. Nous avions en outre intérêt à soulager le plus tôt possible, par un mouvement offensif à l'ouest des Vosges, l'entrée en action de l'armée d'Alsace. En outre, la date que je venais de choisir allait coïncider avec celle du début des opérations russes, ainsi que me l'annonçait un nouveau télégramme de M. Paléologue[1].

    Excellence : "Nous espérons que l'armée belge voudra bien continuer l'action déjà si brillamment commencée au nord de l'aile gauche de nos armées." Je réponds d'une façon formelle au vœu exprimé par le généralissime français. L'armée française peut compter sur le concours absolu de l'armée belge à l'aile gauche des armées alliées, dans la limite de ses forces et de ses moyens restants et dans celle où ses communications avec la base d'Anvers où sont enfermées toutes ses ressources en munitions et en vivres ne seraient pas menacées d'être coupées par des forces ennemies importantes. Afin d'être renseigné sur les opérations des grandes armées alliées et de pouvoir ainsi coordonner nos propres mouvements avec les leurs, j'ai désigné pour être attaché au général Joffre le major Melotte, après que sa mission auprès du général Sordet sera terminée, et au général Lanrezac le colonel d'Orgéo de Marchovelette. J'accueillerai d'autre part avec grand plaisir les officiers que vous voudrez bien désigner pour être attachés à mon Q. G. Croyez, cher et grand Ami, à la profonde gratitude de l'armée belge et de son chef pour l'appui fraternel que leur prête, dans ces moments critiques, l'armée française et, avec mes vœux ardents pour une commune victoire, veuillez agréer l'expression de mes sentiments dévoués.

    Albert

  1. Télégramme de Pétersbourg du 9 août 1914, 21 h. 16, de M. Paléologue, téléphoné par le général Ebener le 10 août 10 heures et demie et reçu par le général Belin. Ce télégramme indiquait les grandes lignes du plan d'opérations russes ; marche de l'armée de Vilna vers Kœnigsberg appuyée par l'armée de Varsovie.