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entrevue avec le maréchal french

du gros, et que ses troupes ne seraient susceptibles de s'ébranler que le 24. Je représentai au maréchal tous les inconvénients de ce retard : il me promit de le réduire autant que possible.

Puis nous abordâmes l'étude de la situation générale de l'ennemi telle que nous nous la figurions à ce moment. J'insistai sur le point que nous étions assez mal renseignés sur les forces qui se trouvaient opposées à l'armée belge sur la rive nord de la Meuse, mais que, d'après nos derniers renseignements, il semblait n'y avoir dans cette région que de la cavalerie ; les groupements importants de cette arme rassemblés dans la région de Hannut semblaient destinés à couvrir sur la rive gauche du fleuve le mouvement de colonnes allemandes signalées antérieurement autour de Liége et qui paraissaient former la masse principale de manœuvre ennemie.

Nous étudiâmes alors la question de la manœuvre à réaliser. J'indiquai au maréchal French que, du côté de l'aile nord, l'imprécision sur les forces adverses était telle que je ne pouvais encore définir mes intentions que dans une forme vague : mon idée était d'exécuter une action général franco-anglo-belge contre le groupe des forces ennemies du nord. A mon avis, le concours que j'attendais de l'armée britannique devait consister à se porter aussitôt que possible au nord de la Sambre, prête à marcher sur Nivelles, soit à gauche de la 5e armée, si on se dirigeait vers le nord, soit en échelon en arrière de la gauche de cette armée si on marchait vers l'est. Le corps de cavalerie Sordet couvrirait le mouvement de l'armée anglaise. Quant à l'armée belge, j'estimais que, tout en couvrant Bruxelles et Anvers, son rôle devait consister à agir sur le flanc extérieur des forces allemandes, en les prenant, si possible, à revers.

Sir John French me promit de donner aussi complètement que possible satisfaction à mes désirs, et il me déclara qu'il allait prendre contact avec le général Lanrezac, dont je louai d'ailleurs les aptitudes manœuvrières. Il me quitta pour aller coucher à Reims.