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l'évolution des doctrines

Il s'agissait tout d'abord de fixer les bases raisonnables d'une doctrine offensive, et de faire pénétrer cette doctrine depuis le Conseil supérieur de la guerre, l'état-major de l'armée et l'École supérieure de la guerre jusqu'aux derniers échelons de la troupe.

Pour la mise au point des théories offensives, j'eus recours à la seule méthode pratique qui fût à notre disposition : les exercices sur la carte et sur le terrain.

J'ai dit que, depuis la réorganisation du Conseil supérieur de la guerre, chacun de ses membres avait auprès de lui un petit nombre d'officiers représentant le noyau de l'état-major qui lui serait affecté en cas de mobilisation, et en particulier le chef de cet état-major. La réunion de ces chefs d'état-major constituait le comité d'état-major. Il était tout indiqué d'utiliser les membres du Conseil supérieur de la guerre et leurs états-majors pour ces études de cas concrets ; j'obtenais ainsi le double résultat de fixer la doctrine et d'entraîner les états-majors à leurs fonctions de guerre. J'organisai donc une série d'exercices sur la carte de groupe d'armées contre groupes d'armées, avec comme exécutants les membres du Conseil et leurs états-majors. A la suite de ces exercices stratégiques, ces généraux faisaient à leur tour exécuter dans le même cadre un nouvel exercice auquel prenaient part les corps d'armée relevant de leur inspection. Au printemps, on reprit sur le terrain la manœuvre étudiée sur la carte, chaque échelon de commandement se trouvant à sa place réelle avec tous les moyens de liaison pour la transmission de ses ordres. A leur tour, les commandants d'armée rééditaient en manœuvres de cadres le thème étudié auquel participèrent les stagiaires du Centre des Hautes Études militaires et les professeurs de l'École de guerre. Toutes les idées, toutes les conceptions, toutes les audaces, toutes les timidités s'y affrontaient ; petit à petit une doctrine s'élaborait ; les conditions d'une offensive énergiquement mais prudemment conduite s'y précisaient.

C'était la première fois que de tels exercices étaient