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Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/442

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la poursuite après la marne

sion avec énergie. Et le 13 septembre dans l'après-midi, je dus lui prescrire de faire une enquête pour déterminer comment l'ennemi avait pu se décrocher depuis quarante-huit heures devant son armée, sans qu'il en eût été informé.


Une grave question commençait à se poser : celle des munitions d'artillerie. On sait que nous étions partis en campagne avec un approvisionnement total d'environ 1 400 coups par pièce de 75. Les consommations de munitions qui ne s'étaient élevées pendant le premier mois de la guerre qu'à 200 coups par pièce environ, avaient augmenté dans des proportions très considérables pendant la bataille de la Marne, où certaines artilleries divisionnaires avaient tiré 300 coups par pièce et par jour. Dès le 14 septembre, je fus amené à prendre des mesures pour réagir contre la tendance fâcheuse qui se répandait d'employer constamment l'obus explosif en négligeant l'obus à balle, tendance qui menaçait d'épuiser rapidement nos stocks. Je reviendrai plus loin sur cette crise de munitions, qui commença d'ailleurs à sévir au même moment chez nos adversaires. Pour l'instant, ce que je veux dire ici, c'est que la stabilisation des Allemands n'a pas été due à notre pénurie de munitions, qui ne s'est réellement fait sentir qu'après que l'ennemi se fut incrusté dans des positions fortifiées ; la cause essentielle de cette stabilisation a été le manque d'habileté manœuvrière et la lenteur dont firent preuve pendant cette période d'exploitation de la victoire les deux armées d'aile et le 5e armée.


Si la victoire de la Marne ne donna point tout ce que j'en attendais, il me paraît légitime d'en marquer cependant en peu de mots les résultats essentiels.

Le mois d'août 1914 avait donné aux Allemands la première manche de la partie : les Belges rejetés sur Anvers, les Franco-Britanniques vers la Seine, notre aile gauche menacée d'être encerclée et Paris d'être enlevé ; sans doute, à ce moment, les Allemands entrevirent-ils un Sedan