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et quoique je m’avouasse tout bas que j’eusse préféré un jeune mari qui m’apportât moins de fortune mais un amour plus jeune, je ne pus me plaindre de celui dont je portais le nom.

» Après quelques années remplies d’un calme plat, M. de Zayska mourut ; je me trouvai veuve à 25 ans, ayant une fortune bien nette, bien acquise, et alors je voulus vivre à mon goût. Peut-être, me disais-je, aimerais-je et serais-je aimée, là est le vrai bonheur. Le temps de mon deuil écoulé, je rentrai dans le monde, je courus les bals, les fêtes, je devins comme vous le savez, et grâce à vous, mon cher Burt, une femme à la mode. Cela amusait mon esprit, mais non mon cœur et j’étais relativement heureuse, lorsqu’un jour je rencontrai le comte Raphaël de Noirac.

» Je n’ai pas besoin de vous faire son portrait, car l’homme aimé est toujours, aux yeux de celle qui lui appartient, l’homme le plus beau de la création. Je ne vous parlerai seulement que de son exquise distinction qui en faisait un gentilhomme accompli. Attaché d’ambassade, quoique peu riche, il avait tout ce que pouvait désirer une femme exigeante.

» Nous nous aimâmes : Je me croyais aimée à la folie, et, entraînée par cette