brusquement conquise à la faveur d’un malentendu, ne lui déplaisait nullement. Je le vois encore, hilare, la tête enfoncée dans son dolman, se frottant joyeusement les mains :
— Les imbéciles !… Ils finiront par croire ce qu’ils disent.
Après ça, Hervé devint l’homme qui criait : « À bas la République ! »
L’histoire est tout aussi amusante que celle du drapeau. Car Hervé était surtout républicain, et jamais l’idée de proférer semblable blasphème ne l’aurait effleuré. Le coupable, c’était son secrétaire de la rédaction, à la Guerre Sociale, Almereyda.
Hervé venait d’écrire un article « très enlevé » dans lequel il signalait l’apathie des masses, leur détachement du régime. Il criait aux responsables :
« Attention ! Si vous continuez, le peuple va de plus en plus se désaffecter de votre République. Bientôt, ce sera le cri : À bas la République ! qui retentira à vos oreilles ! »
Comme on voit, il s’agissait d’un cri d’alarme, d’une mise en garde brutale. Rien qui fût de nature à émouvoir ou à provoquer le scandale.
Seulement, Almereyda était là, qui veillait et qui confectionnait le journal. Sa principale préoccupation, c’était de découvrir, chaque semaine, la manchette sensationnelle. Il était prêt à tout sacrifier à la manchette par une sorte de déformation