faconde intarissable. Puis, le soir descendu, dans la paix de mon étroite prison, l’esprit encore enfiévré, j’arrangeais sur le papier, en phrases rapides et confuses, les mots recueillis, les divagations théoriques mêlées de vérités éblouissantes que, dans un pêle-mêle inouï, j’avais pu butiner.
Ah ! mes entretiens avec Ugolin ! C’est là ce que je tente de faire revivre aujourd’hui, dussent leur aridité et leur rigueur scientifique rebuter ceux qui me liront. Mais rien ne me tiendrait de ce journal semé de confusions si je n’apportais les indispensables explications.
Premier entretien. Ugolin est toujours assis à son bureau, flanqué de ses deux acolytes, la boule broussailleuse et le bâton noueux à tête d’oiseau. Un nouveau personnage, pourtant, long et fluet, confit dans une étisie sans exemple au monde, visage glabre et humide, l’aspect férocement érémitique. Ugolin, en deux mots, le présente :
— Professeur Ciron, mon collaborateur et secrétaire.
J’esquisse un salut. Le personnage étique et étriqué ne bouge point.
— Monsieur Doucet, continue Ugolin, écoutez-moi très attentivement. Vous n’êtes pas versé dans les choses scientifiques et je vais m’efforcer de m’installer à votre portée. Je vous ferai le cours des profanes. Ouvrez vos oreilles et bandez votre intelligence. Il est question de la vie, de la mort, de la vieillesse et de… l’immortalité. Problèmes qui ne vous sont peut-être pas très familiers.
En effet, je sais qu’on apparaît un beau jour sur ce globe, sans l’avoir voulu ; qu’on y végète un certain