Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/9

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Mon petit Simon !… Je l’aime, certes. Je l’aime pour son intelligence prompte, ses yeux qui sont deux caresses, ses boucles d’un blond doré… Ses muscles accusent une souplesse et une vigueur dont je suis friand. Son corps est d’un jeune dieu. Mais qu’importe le vêtement périssable dont il est paré et que guette la vétusté. Son âme seule est en cause, ce qu’il peut offrir de son âme… Il est, devant moi, comme une fleur merveilleuse dont j’absorberai, d’une aspiration, tout le parfum pénétrant pour rejeter, ensuite, les pétales vidés de leur essence.

Le cadet, mon tout mignon Horace ? Il a du temps encore devant lui. Que sa magnifique innocence s’épanouisse dans les jeux ! Mais je ne songe point sans amertume à Hélène. La malheureuse est condamnée par son sexe. Elle subira le sort de la femme.



C’est étrange. Chaque fois que les années me rapprochent de l’indispensable opération, ma pensée bondit irrésistiblement vers des lectures d’antan qui bercèrent mon enfance, en un siècle de barbarie. Il m’arrive d’évoquer le lamentable Isaac traîné par le patriarche vers l’horreur du bûcher. Seulement, dans la légende biblique, le père sacrifiait son fils à une divinité cruelle qui, d’ailleurs, n’existait que dans son imagination. Plus tard, aussi, des pères firent don de leur progéniture au Dieu sanglant de la guerre. Qu’y a-t-il de commun entre nous, qui portons le flambeau de la vie, et ces sauvages semeurs de mort et de souffrance ?